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Pouvoirs miraculeux !

Photo du rédacteur: Joshin Sensei Joshin Sensei

On dit qu’il y a deux façons de rencontrer l’Enseignement et donc de réaliser la Voie : l’attraper ou le recevoir- l’attraper après une longue lutte solitaire ou le recevoir en lien avec les autres, ce qui crée un contexte où l’on comprend qu’on ne s’éveille jamais

seul.

Les spécialistes, bien sûr les Maîtres, mais les vraies spécialistes pour aider les moines à s’éveiller en Chine ancienne, ce sont des vieilles femmes, qui apparemment se trouvent partout en ville comme dans la campagne, à vendre des tasses de thé et des gâteaux de riz....

Ces vieilles femmes, elles n’ont pas de pouvoir, pas de statut social, on ne connait pas leur nom, elles sont laïques- ce sont des femmes et elles sont vieilles.

En général, elles sont complètement ignorées et pourtant au cours d’un dialogue, ou plus exactement lorsqu’elles s’adressent aux moines de rencontre ( qui veulent généralement juste boire un thé!) dans une sorte de challenge, elles aplatissent l’arrogance des moines et sèment la confusion et l’erreur qui font partie de la pratique. Le tout est de les voir. Elles offrent généreusement cette occasion en semant le trouble jusqu’à ce que leur interlocuteur abandonne sa posture de « moi » et reste sans voix sans arguments- il retrouve l’esprit du débutant en quelque sorte!


Elles s’adressent aux Maîtres aussi d’ailleurs...L’une d’elles, munie d’un panier, explique à Chao Chou (Joshu) qu’elle vient lui voler ses pousses de bambou ; une autre ridiculise Lin Tsi en lui éclatant de rire au nez ; une troisième rappelle à un Maître revenu en grand équipage dans sa ville natale qu’il est le fils du ramasseur de poubelles...

A travers leur présence, leur corps, leurs paroles, leurs rires, elles expriment ce qu’on appelle dans le Zen « la gentillesse des grands- mères », une gentillesse souvent rude, parfois féroce.


Ce matin, je voudrais parler d’une de ces omniprésentes vieilles femmes ; trois moines entre dans une maison de thé ; la vieille femme prépare une théière et l’apporte avec trois tasses, et elle dit cette chose surprenante: «  Moines, que ceux d’entre vous qui ont des pouvoirs miraculeux boivent le thé ». Les moines ne bougent pas, ils se regardent, ils ne disent rien. C'est d’assez mauvais effet dans le bouddhisme de se vanter de ses pouvoirs miraculeux. Rien ne se passe.

Alors elle ajoute : «  Regardez cette vieille femme décrépite vous montrer ses propres pouvoirs miraculeux. » Alors elle verse le thé dans les tasses et s’en va.

Et c’est tout !


Les moines sont entrés, ils se sont assis, et puis ils ont attendu, ils sont habitués à recevoir des offrandes. Ils ne font sans doute même pas attention à la vieille femme jusqu’à ce qu’elle leur parle. Qui a des pouvoirs? Je pense qu’elle ne plaisante pas, ne sourit pas, elle est tranquille, juste qui elle est, juste ce qu’elle est. Et elle leur montre qu’il n’y a pas besoin d’attendre, d’imaginer quelque chose de spécial, d’extra-ordinaire !

«  Juste ce qui est devant vous ». Si vous voyez cela, si vous agissez de façon juste avec juste ce qui est devant vous, alors chaque moment est vraiment miraculeux!


Regardez : dans le thé il y a le soleil, la terre, la pluie, le travail, le plaisir du partage d’un moment…Tout l’univers est là quand elle verse le thé. Et quand vous coupez les légumes, quand vous plantez des fleurs, quand vous réalisez un dessin, quand vous marchez...Tout l’univers est là, c’est miraculeux..;si vous vous en rendez compte!

Ce que la vieille femme savait, c'est que ses pouvoirs étaient suffisants, exactement comme ils étaient, exactement à ce moment-là. Pas besoin de chercher la chose suivante, ou une chose meilleure ou quelque chose de plus important ou de plus intéressant ; elle n’est même pas rester autour pour voir les résultats de ses paroles, elle savait que c'était miraculeux et elle l'a fait et c'était assez.

Peut être que nous aurons un jour des pouvoirs miraculeux: savoir quel miracle c’est d’être vivant en cet instant…ou bien qui sait ? marcher sur l’eau, traverser les murs….mais en attendant nous développons le pouvoir miraculeux du don et du partage, de l’attention et de l’humilité, de l’harmonie.


Et puis un jour nos coeurs seront assez vastes pour prêter attention à tout, sans choisir; pour passer à travers les murs, ceux qui enferment notre esprit; pour offrir metta même aux personnes avec qui c’est difficile; pour prendre soin de nous et des autres, et de chaque chose que nous rencontrons…Voilà un pouvoir miraculeux



Marie Grace Orr dans :The Hidden Lamp: Stories from Twenty-Five Centuries of Awakened Women Résumé et traduction Joshin Sensei (un livre de koans et d’histoires plein de nonnes, de vieilles et jeunes femmes, et aussi de moines, d’hommes laïcs) r


Ensuite j’ai pensé à M° Dogen ; lui on ne l’aurait pas eu comme ça parce qu’il s’y connaissait bien en pouvoirs miraculeux de la vie quotidienne, il nous les rappelle sans cesse.Il nous dit : lavez le riz, balayez le sol ; il nous dit qu’en un seul instant le coeur s’ouvre, sans avant ni après, et que si nous écoutons bien, nous entendons que le coeur tinte même quand il n’y a pas de vent, que l’Eveil enveloppe le ciel et la terre, et que l’Eveil éveille l’Eveil, et que ce coeur est le tout, calme et apaisé.

Regardez bien, ne négligez rien ; il écrit ce que la vieille femme savait, c’est sûr :


Notre pratique est de reconnaître

la signification

de tout ce qui est

                           - même un grain de riz

ou un peu d'eau.


Exprimer un respect total

pour un grain de riz

c'est exprimer un respect total

pour le Bouddha.Alors vous comprendrez

   que ce grain de riz

    est l'absolu.

 M° Dogen


Je suis sûre que vous comme moi, nous allons utiliser nos pouvoirs miraculeux quotidiens de nombreuses fois aujourd’hui, en souriant, en regardant le monde, en versant le café ou le thé...Quel dommage si nous ne savions pas les reconnaître, et les apprécier!





 
 
 

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