SI on parlait de Noël : quelle approche ? Non pas bouddhiste, bien sûr, mais en réfléchissant à nos attentes ou à nos refus par rapport à cette fête.
Soit vous approchez un Noël joyeux : des cadeaux, des repas de fête : comment remplir ces attentes tout en restant dans « la Voie du Milieu » !
Si au contraire, vous êtes de ceux/celles qui n'aiment pas cette période de fêtes, que ça attriste parce que mauvais souvenirs ou solitude...comment y participer pour partager la joie de vos proches ou d’inconnus ?
Ce n'est pas facile de ne pas se laisser embarquer dans ce trop de fin d'année, il y a les attentes de sa famille, des enfants ; il y a l'avidité encouragée ; mais il ne s’agit pas non plus d’afficher l'attitude de celui qui est... « spirituel » ... au-dessus de tout ça, de celui qui juge et condamne, parce qu’il y a trop d’argent, dépensé ou gaspillé, ou à cause de la joie « obligatoire ».
D’abord, Noël, c’est cadeau, oui c’est un don - c'est une bonne idée proposée par une personne de la Sangha il y a quelques années, de donner l'argent qu'on aurait dépensé en cadeaux pour les adultes, souvent inutiles, ou non désirés, à une association caritative, et ne s'offrir que des petites choses sans autre valeur que celle du coeur...Bonne conscience à peu de frais? Bonne conscience: oui, pourquoi pas; elle est, après tout, plutôt meilleure à prendre que la mauvaise, quand elle s'appuie sur quelque chose de « bon » (le don) .
Suivre la Voie du Bouddha, ce n'est pas dans les occasions festives être morose, ni imposer ses choix à ceux qui nous entourent mais trouver en s’appuyant sur les Enseignements comment être avec les autres, comment être dans la joie, cette joie partagée dont parle les Enseignements : « mudita », la joie de la joie des autres !
Peut-être - « peut-être » parce que je n'ai pas de réponse toute prête, heureusement- déjà le premier pas, ce serait accepter la joie : joie de se retrouver, joie de l'émerveillement devant la lumière qui encore une fois va réapparaître.
Si vous vous sentez exclu- ou si vous vous excluez de ce moment, on peut chercher comment y revenir à travers la pratique de la Voie, càd à travers le regard tourné vers les autres, à travers le don- qui n’est pas le cadeau superficiel : le don de la présence, le don de l’attention tournée vers les autres, on va même voir le don du sourire !…Prendre Noël, comme nous le dit le moine de la Forêt Bhante Sudhaso « une occasion qui nous est offerte pour pratiquer plusieurs aspects de la Voie : générosité, attention aux autres, gentillesse aimante . » Et nous rappeler que « Si nous essayons trop de nous isoler, nous perdons des occasions de pratiquer « metta »- ce regard et ces actes tournés vers les autres avec un coeur ouvert.
Pour réfléchir ensemble à cette période de Noël, je vous présente deux textes: l’un sur la compassion en actes ; l’autre sur la formidable occasion de pratique qu’est vivre en ville !
La compassion en actes
Le moine bouddhiste Ajahn Chah dit : « Tout ce qui nous inspire à voir ce qui est vrai et à faire ce qui est bon est une pratique juste. » c’est une phrase très ouverte, sortir de nos catégories, voir le bon et le juste où ils se trouvent.
Noël en est un excellent exemple. A première vue, ce n’est pas une fête bouddhiste, et pourtant en regardant bien, nous voyons que c’est une occasion qui nous est offerte pour pratiquer plusieurs aspects de la Voie : générosité, attention aux autres, gentillesse.
La pratique des cadeaux notamment est une traduction concrète du principe de compassion. On le comprend bien en se souvenant que nos actions s‘élèvent directement de nos états d’esprit : la perfection de la compassion comme état d’esprit se manifeste naturellement à travers des actes concrets de gentillesse et de générosité.
Si nous voyons que nous n’agissons pas spontanément pour le bien-être des autres, cela nous indique que nous avons besoin de développer davantage le coeur de notre compassion. Et cela peut se faire à travers des cadeaux offerts aux autres.
Bhante Suddhaso , moine dans l’ordre Thai des Moines de la Forêt.
Au coeur de nos villes
Quand on pratique une voie spirituelle, on souhaite souvent vivre seul au coeur de la forêt, et pourtant une ville peut être un support de la pratique aussi bon, et peut-être meilleur. La ville n’a pas beaucoup d’arbres, mais elle a plein de personnes, qui sont tout aussi naturelles ! Et ces personnes nous offrent énormément d’occasions de pratiquer « metta », la gentillesse aimante, et la compassion, la joie pour le bonheur des autres et l’attention égale pour tous.
En ville, sauf à s’enfermer chez soi, on ne peut pas ne pas voir que nous sommes entourés de gens : il y a la femme âgée de la porte à côté, le sdf qui dort parfois sur le pas de l’immeuble, et les jeunes qui jouent de la batterie au-dessus.( Les gens : plus facile à aimer en général : sauver tous les êtres, qu’en particulier : voisins, sdf, etc ! À bien regarder...)
Si nous essayons trop de nous isoler, nous perdons des occasions de pratiquer metta. Mais si nous cultivons la reconnaissance, la compréhension de notre interconnexion, alors nous pouvons développer la gentillesse aimante envers les gens en ville, et pratiquer très souvent.
Nous croisons tant de monde chaque jour : parfois juste sourire est une façon de pratiquer metta ; ( Thich Nhat Hanh parle beaucoup du sourire comme d’une pratique :
« Pour bien méditer, vous devez sourire, beaucoup… Je dis toujours qu’un sourire peut être une pratique, un genre de yoga. Le yoga de la bouche: vous souriez tout simplement, même si vous n’éprouvez pas de joie spéciale, et vous verrez qu’après vous vous sentirez différent » )
Que ce soit dans le métro, ou à la laverie, il y a plein de façons de pratiquer. Et tous les sdf, ceux qui sont amicaux, ceux qui désagréables, ou tristes, avec leurs sacs plastiques qui contiennent toutes leurs affaires. On a l’impression que c’est très important pour eux que quelqu’un leur prête attention. Mais nous ne ressentons pas ce sens des responsabilités envers tous. Je ne dis pas que nous devons ouvrir notre porte à tout le monde, ce ne serait pas réaliste, mais il y a néanmoins beaucoup de façons d’aider les autres.
C’est si important – être présent, complètement présent devant une autre personne plutôt que d’être toujours enfermé dans nos têtes. ( ou dans notre smartphone !)
Si nous ne pouvons pas reconnaître les occasions d’aider les autres dans le besoin, alors c’est nous qui y perdons. De petits gestes de gentillesse, d’attention nous transforment : ils nous reconnectent aux autres et ouvrent la meilleure part de notre esprit ( c’est l’égoïsme altruiste du Dalaï Lama : aider les autres nous aide nous-même : c’est bien pour les deux...)
Qu’est-ce que ça veut dire changer le monde ? Regarder autour de vous et vous trouverez plein de choses à faire.
Dzigar Kongtrul Rimpoche
Deux gathas pour finir, vous savez ces petits quatrains qui nous font « changer notre vie » en regardant autour de nous, et en décidant d’aider, et d’aimer le monde !
Allumer une bougie :
Honorant la sagesse de mes ancêtres
et de mes enseignants,
puissé-je, pour tous les êtres,
ouvrir mon coeur à l’Illumination.
Pour le solstice de décembre, aujourd’hui ( à 9h20!), le moment de l’année où la nuit est la plus longue :
Au sortir de la nuit,
puissè-je moi aussi pour tous les êtres
voir avec un regard pur
ce qu’il me reste à faire dans ma vie
pour trouver le chemin de la paix
Et vivre Noël, quelles que soient nos circonstances, à travers metta, à travers le partage, et en faire un moment de joie partagée...
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